Dans son ensemble, l’œuvre de Chomo paraît à la fois archaïque et d’une grande actualité. Inclassable au premier abord, presque hétéroclite, tant son auteur a expérimenté de procédés et de matériaux, elle fait preuve d’une grande unité au niveau de la recherche technique et de l’inspiration. Délaissant la pierre et le bronze par défi et nécessité, Chomo a toujours utilisé des matériaux pauvres, naturels ou industriels : sable de la forêt, brique, bois mort, plâtre, grillages, tôles usagées, plastique, béton cellulaire, etc. Sous le double signe de la nature et du feu, son œuvre explore, en fait avec beaucoup de science, toutes les possibilités de la récupération et fait usage des techniques les plus variées. Ses Bois Brûlés, ses tôles martelées ou lacérées, ses papiers froissés, ses sculptures de grillage modelé et plastique fondu, ses « jouets stigmatisés » ou ses sculptures de « mousse de chaux », comme il appelait le béton cellulaire dont une amie lui avait apporté une provision, attestent un métier extrêmement abouti et original, tout comme sa maîtrise des patines et son usage des incrustations de sable et de verre. C’est la rusticité des matériaux qu’il utilise qui a fait classer Chomo, imprudemment, dans l’art brut ou dans l’art « singulier ». Mais derrière ce caractère volontairement « primitif » se cache en fait un artiste très professionnel, qui n’a rien de « naïf » sur le plan de la recherche plastique. « Tout est expérimental, ce sont des jalons, des noyaux à développer. Mais je suis tout seul, je n’ai pas le temps », se plaignait souvent Chomo à ses visiteurs, avant de passer à autre chose, dans sa frénésie créative ininterrompue.
Laurent Danchin